30 mai 2010, c’est le grand jour. Les enfants ne sont pas là car nous avons pris une semaine de vacances sans eux pour s’approprier notre nouveau voilier, apprendre à naviguer avec lui, se rappeler les manœuvres, pratiquer l’accostage, découvrir la vie à bord. Car à ce moment, notre expérience de navigation se résume à une petite semaine de 5 jours de formation pour le brevet élémentaire plus un week end familiale entre amis à bord d’un catamaran avec skipper, tous deux sur le lac Champlain. Nous sommes donc un peu nerveux à l’idée que la grue nous abandonne sur l’eau et que nous devions seul se rendre à notre bouée de mooring.

Alors comme tout le monde, nous suivons notre bateau derrière le travel lift (la grue qui transporte les voiliers de la terre jusqu’à l’eau) en prenant des photos.

Nous sommes tout excité, heureux d’être enfin parvenu à ce jour tant attendu, mais aussi nerveux car la marina Monty’s Bay où nous sommes ignorait que notre bateau était si lourd… et le travel lift n’est pas conçu pour une telle charge. Et nos voisins d’en face, Jean et Gabriel de Beauté des îles, nous racontent que quelques années plus tôt, la marina avait « échappé » (!) leur bateau, en plein milieu de la rue! Ah ah!  Nous sommes donc légèrement nerveux! Mais nous sommes chanceux, il n’y a pas de vent, la mise à l’eau devrait donc bien se faire et Jean nous accompagne pour nous aider avec les procédures de vérification du moteur une fois à l’eau.

Nous traversons donc la rue, tout va bien. Le travel lift s’avance au dessus de la rampe de mise à l’eau, Oséo descend doucement dans la descente. Tout va encore bien, mais ça va être serré. On avait installé les défenses de chaque côté, mais… non… ça va pas passer avec les défenses. C’est vraiment serré… Oséo passe tout juste dans la descente, il y a à peine un demi pouce de chaque côté. Mais bon, c’est la deuxième année qu’il est entreposé ici et ça a toujours passé alors, ça va aller. Et ils sont des professionnels, ils savent ce qu’ils font.

Erreur…

Oséo est dans l’eau, il flotte, le moteur fonctionne. On enlève donc les strappes qui relie Oséo au travel lift. On entreprend ensuite de pousser doucement Oséo pour le faire cheminer à travers la descente car il n’y a vraiment pas de jeu. On est à un demi pouce de chaque côté. On est à un quart de pouce… on est… il n’y a plus de jeu… on est accoté… à gauche, à droite, on est accoté. On pousse un peu plus… mais non, on est vraiment accoté! On met un peu de gaz, je sais plus trop si on avance mais, on n’est plus accoté maintenant, on est coincé! On est coincé dans la descente!!!! Pouvez-vous croire ça, on est coincé!!!! Est-ce que c’est déjà arrivé à quelqu’un ça??? Mais non, jamais! Juste à nous c’est sûr!!

Oséo est coincé dans la descente. Les strappes ont été retirées. On ne peut plus les remettre, on est donc vraiment coincé là et il faut qu’on réussisse à sortir de là. On pousse le moteur. On pousse plus le moteur. Mais rien à faire, il n’y a rien qui bouge. On est vraiment, vraiment coincé. Qu’est-ce qu’on peut faire??? C’est notre premier bateau, c’est notre première mise à l’eau et on n’a aucune idée de ce qu’on peut faire. Les gens de la marina non plus d’ailleurs, et ils n’ont aucune suggestion pour nous. Les gens commencent à accourir. « Il parait qu’y’a un bateau coincé dans la descente », « Oui oui, Nutmeg… ». On est ouvert aux suggestions. On nous propose alors de faire gîter le bateau, comme ça on sera peut-être moins large et on parviendra peut-être à sortir. Ronald et moi on se regarde, bon, qu’est-ce qu’on fait? De toute façon, j’ai pas d’idée et de toute façon, le gelcoat est déjà tout grafigné et de toute façon, on est pogné ici alors on va faire ça. Tout le monde embarque alors à bord on se met tous sur bâbord. Ca marche, le bateau gite et il bouge un peu… mais il se recoince. Et là, il est comme coincé sous le quai de métal. Alors on tire, on pousse, on embarque plus de monde et on gite plus. Et on tire sur les chandeliers. Mes beaux chandeliers qu’on vient de réparer, il est tout croche! Mes beaux filets que j’ai mis deux jours à installer, ils sont tout brisés. Le gelcoat que Ronald a tout refait, il y a des grosses entailles! J’hallucine! C’est irréel!

Oséo avance un peu mais finalement, on est vraiment, vraiment coincé. Le bateau est gité dans la descente, les quais de métal sont encastrés dans la coque et ça ne bougera pas. À l’extrémité du quai, il y a un renflement qui rend impossible toute sortie. Alors marina, on n’a pas le choix, il faut que vous coupiez ce renflement. Coupez le quai, on n’a pas le choix! Alors la marina va couper son quai!

Mais qu’est-ce qu’ils regardent ceux-là???

Ah! Mais c’est nous qu’ils regardent!

Et Oséo va sortir de là, enfin, quelques heures plus tard. On a les nerfs à vif, on a faim car on n’a pas pris le temps de déjeuner et on n’a presque rien mangé. On est aussi déshydraté car on n’a pas pris le temps de boire. Le vent s’est levé entre temps et il faut maintenant aller à quai pour débarquer tout le beau monde qui sont venu pour nous aider et qui sont toujours à bord. « Nous, on conduit pas! » Alors Bruno prend la barre et nous ramène au quai avec un accostage pas très réussi mais bon, on n’en est pas à une scatch près! L’important, c’est qu’on soit au quai, sorti de là et, je n’y croyais plus, le bateau flotte toujours!

On constate les dégâts : Entailles assez profondes au gelcoat sur bâbord et sur tribord, chandelier très lousse, filet troué, rails bâbord et tribord profondément encochés… Mais franchement, je m’attendais à vraiment pire. C’est vraiment solide!

On prend le temps de relaxer un peu au quai de service, remettre les chandeliers en place, remettre les pataras (câbles arrières qui retiennent le mat). On prend notre courage à deux mains et on se dirige vers notre mooring. Je tremble encore des émotions précédentes et là le vent est vraiment levé, il souffle du nord d’où nous ne sommes pas protégé. Il y a de la vague et on ne prend pas le temps de réfléchir à comment doit se faire la manœuvre pour récupérer notre mooring puisque c’est supposé être facile. Mais comme on n’y a pas réfléchi et qu’on ne l’a pas fait très souvent, on ne le prend pas avec le vent de face comme on devrait le faire. On fait ça tout croche et on n’arrive pas à attraper notre mooring! C’est l’exaspération! On est fatigué, on veut juste que la journée finisse. Heureusement, Michel de Belle Arianne vient à notre rescousse avec son dinghy et nous propose de prendre le vent de face, ça va aller mieux. En effet, on arrivera finalement à s’amarrer. Enfin! C’est fini! Fini pour aujourd’hui. Mais on est fatigué. Catherine l’est et il vente et ça brasse et Catherine a mal au cœur! Aaaaahhhhh! Je veux que la journée finisse! Je ne veux pas souper! Je veux que la journée finisse, point. Le bon souper préparé par Ronald ne sera pas mangé par Catherine. Elle ira se coucher tôt, dormira bien et demain sera un autre jour. Une belle journée cette fois-ci.

Et cela met fin à cette journée catastrophe.

On constate les dégats

Et c’est épuisés que nous terminons cette journée de /$%?$”(&

Un petit merci à Jean et Gabrielle pour leurs bons conseils et leurs outils!